Genève, si proche mais si lointaine, par Didier Durand (Bref Rhône-Alpes)

article publié le 23 octobre 2013

Certaines réalités sont bonnes à rappeler : Rhône-Alpes vit à proximité de la métropole la plus dynamique du pays le plus compétitif du monde ! Mais à moins de 90 minutes en voiture de Lyon ou Grenoble, le bassin genevois est si… lointain. C’est entendu : Lyon et Genève s’ignorent.

Le Ceser s’est penché sur les origines de cette moue réciproque(1). En 1462, Louis XI avait déjà lancé la “guerre des foires franches” en interdisant aux marchands français de se rendre à Genève durant les foires de Lyon, dont il avait aligné les dates sur celles de Genève. En 1550, Lyon se plaçait alors au 4ème rang des cités européennes derrière Paris, Naples et Anvers ! Une prospérité qui ne résistera pas à l’évolution des flux commerciaux coloniaux favorisant des villes portuaires, ni à l’absolutisme et à la fiscalité royale, plus tard à la centralisation parisienne, avant son redressement avec la soierie au XVIIIème siècle, qui marque encore aujourd’hui l’économie lyonnaise (chimie, mécanique, textile).

Genève, une histoire internationale

De son côté, Genève s’est démarquée à plusieurs moments clés de son histoire : l’adoption de la Réforme et de la République (1536), l’accueil des protestants après la révocation de l’Edit de Nantes (1685), qui attire une foule d’hommes d’affaires, de banquiers, d’imprimeurs ou d’horlogers sur les bords du Léman ; son ralliement à la Suisse en 1815 ; sa déclaration de neutralité ; la fondation de la Croix Rouge (1864) puis de la Société des Nations (1919), ancêtre de l’ONU voulue par Wilson, un président des Etats-Unis calviniste. C’est l’origine de la fonction internationale et diplomatique de Genève qui perdure (40 000 fonctionnaires internationaux) et qui a, par exemple, permis le développement de l’aéroport de Cointrin (14 millions de passagers par an contre 8,5 millions pour Saint Exupéry). Genève accueille un nombre impressionnant de multinationales (70 000 emplois). Elle conserve une position majeure dans le trading des matières premières : c’est ici que sont négociés un tiers des échanges mondiaux de pétrole, de céréales, de riz, de sucre, de coton, 20 % du fret maritime, etc.

Le “Grand Genève”

Malgré le niveau élevé des salaires, l’attractivité genevoise ne se dément pas, avec un taux de chômage (5,2 % en 2012) à faire pâlir l’Hexagone. Mais cette position n’est pas sans susciter quelques problèmes. En premier lieu, ceux du foncier et du trafic, dans une agglomération où la circulation n’est pas plus fluide qu’à Lyon. D’où la relance d’un dialogue très pragmatique entre voisins de part et d’autre de la frontière, à travers la création du “Grand Genève”.

Rendue difficile par deux systèmes économiques, politiques et sociaux très différents, la construction d’une communauté de destin transfrontalière passera, quoi qu’il en soit, par la création de lieux de rencontres entre décideurs. En mars dernier, l’association “Courant 812” (comme le nombre de kilomètres que parcourt le Rhône, depuis sa source en Valais jusqu’à la Méditerranée) voyait le jour. Dans les salons de l’Hôtel de Ville de Lyon, les invités, suisses et français, ont parlé formation, innovation, industrie, culture, tourisme, autour d’une bonne table. Rien de tel pour rompre la glace.

Didier Durand

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