Jeudi 13 décembre 2018 près de Genève, nous étions une cinquantaine à recevoir et échanger avec François Garçon, auteur de l’ouvrage “Le Génie des suisses” (Ed. Tallandier, 592 p.).
Son ouvrage démontre le fossé abyssal existant entre une Suisse décentralisée, pragmatique et “méritocrate”, et une France verrouillée par son rejet de l’économie libérale, son Etat bien trop omnipotent et, surtout, ses élites parisiennes formatées dans les fameuses «grandes écoles». Un constat démontré selon lui de manière flagrante par l’actualité de la révolte des “gilets jaunes”.
Le “génie suisse” est en fait un génie collectif. Celui d’avoir trouvé les bons mécanismes de pouvoir et de fonctionnement d’une économie nationale de taille moyenne dans la mondialisation. Mais François Garçon est très pessimiste sur la manière dont la France pourrait s’inspirer des recettes suisses. En France, tout se décide d’en haut. La caste d’administrateurs sortis de l’ENA et de Polytechnique tient tous les verrous. “On ne vous juge pas, comme en Suisse, sur vos résultats. On vous juge sur votre classement de sortie à l’ENA voici trente ans, alors que vous n’aviez même pas encore perçu votre premier salaire..”. Cette élite n’a aucun intérêt à modifier des institutions qui font d’eux des dominants, pour eux et leur descendance.
Un mot résume tout pour François Garçon, c’est la subsidiarité helvétique. Chaque échelon du pouvoir fait ce qu’il sait et peut faire de mieux. En France, on voit chaque jour dans la presse des déclarations de maires qui se voient imposer des décisions par le préfet, ou directement par l’exécutif, depuis Paris. La réalité locale, les spécificités, tout cela est gommé par un pouvoir vertical, incapable de se remettre en cause. Le système suisse est un modèle d’efficacité qui n’a pas ‘équivalent sur la planète.
Pour notre administrateur Pascal Germann, il n’y a pas lieu d’être aussi pessimiste : “la France peut changer à condition de réformer en priorité son système d’apprentissage”. Mais François Garçon pense que les énarques en charge de cette réforme (Mestrallet, Frerot..) n’y arriveront pas car ils n’y croient pas eux-mêmes pour leurs propres enfants (leur homologue conseiller suisse a 4 des ses 6 enfants en apprentissage)! En France le système de contrat professionnel “enfume” tout le monde et démarre à bac +2 (alors qu’en Suisse il démarre à Bac… -4 !).
Notre ami André Perret, ancien directeur du CSEM de Neuchâtel, s’inquiète pour la France : “la Suisse a besoin d’une France qui se porte bien”… mais François Garçon pense que la France continuera de dégringoler s’il n’y a pas une vraie réforme de l’Etat, le développement d’une compétence en matière de leadership. Pour lui les polytechniciens et les énarques sont totalement incompétents en matière de gestion de crise, et les derniers événements l’ont encore démontré.
Selon notre administrateur David Talerman, les sociétés qui ont de l’avenir devront avoir, comme les suisses, une “intelligence collective”. Pour François Garçon, cette logique est impossible dans un pays où les élites qui gouvernent se construisent sur la base du “rang obtenu dans un concours”, et donc avec aucun sens du collectif.
Pour conclure, notre Président Thierry Baglan cite une intéressante comparaison animalière lue à la fin de l’ouvrage de François Garçon : si la Suisse était un animal, ce serait un poulpe. Un des animaux les plus intelligents avec 500 millions de neurones, mais principalement situées… dans ses tentacules ! Comme la Suisse, le poulpe est capable de s’adapter et de réagir en fonction de l’environnement qu’il rencontre.
Une excellente analyse.
Je viens justement de publier sur Linkedin un article qui va dans le même sens quant à notre difficulté, à nous français, à être pragmatique et à nous réformer.
Cet article intitulé “Economie : des chiffres-clé électrochoc” a été vu en quelques heures par un millier de personnes, ce qui démontre que le sujet est d’actualité (je précise que personnellement je n’ai rien à y gagner).
Très bonne continuation à tous et que nous soyons suffisamment intelligents pour nous inspirer des bonnes pratiques observables ailleurs.
C est la vérité…..